• Certaines catégories sont beaucoup plus complètes que d?autres : les variables « visite à la chambre de commerce » ou « visite de concours ou d?exposition régionaux » sont relativement solides parce qu?elle cumulent un caractère officiel, une mention systématique dans les programmes, enfin parce qu?elles correspondent à des catégories utilisées par les acteurs eux-mêmes.

  • Certaines sont fragiles parce qu?elles correspondent à mon propre codage des données et sont sujettes à un anachronisme évident : ainsi des visites aux quartiers « défavorisés », sous lesquelles j'ai regroupé, pour le début du siècle, les visites dans les quartiers qualifiés par les autorités locales ou les journalistes de « populaires », les visites dans les taudis insalubres sur les 50 premières années du siècle (en particulier les visites aux quartiers en reconstruction après-guerre), enfin, plus récemment, les visites en HLM ou dans les « banlieues ». J'estime néanmoins que leur regroupement est justifié par le statut identique qu?elles tiennent chez les préparateurs élyséens (il s?agit de montrer un président inquiet de la situation des plus défavorisés et de mettre en valeur le rôle de l?État pour leur venir en aide) et leur caractère commun de dangerosité sociale et politique pour le président, tel qu?il est là encore reconnu dans le travail des préparateurs. La variable « concours sportifs » fait l?objet du même type d?analyse assumant l?anachronisme des données pour tenter de mieux saisir les transformations qui touchent ce type d?événements (ici vers la mise en spectacle ludique de l?exploit physique).

  • Le problème de l?anachronisme existe néanmoins également lorsque l?on reprend les catégories utilisées par les acteurs eux-mêmes : ainsi les « visites aux hôpitaux » sont regroupées dans une même variable. Pour autant, par delà cette objectivité apparente, leur sens se transforme profondément au long du siècle. D?autres variables sont fragilisées plus particulièrement par le manque d?informations les concernant, parce qu?elles sont miennes, élaborées dans le cadre d'une problématique particulière, et surtout parce qu?elles sont réalisées durant la présence dans la ville du président mais souvent en l?absence de celui-ci : c?est le cas des « fêtes en marge » qui dénombrent l?organisation de bals, de fêtes populaires, de concours et de jeux par la municipalité ou ses différents quartiers. Pour ces dernières, je suis resté totalement tributaire du passage dans le cadre officiel du voyage de certaines manifestations locales. Elles sont absentes du programme élaboré à l?Élysée. Leur mention apparaît dans les programmes locaux, dans les coupures de presse locale, ou, le plus souvent, dans les rapports de police. Néanmoins, leur caractère marginal les expose à rester invisibles, et ainsi à ne pas apparaître dans mes totalisations. Les « spectacles ouverts » (fêtes vénitiennes, feux d?artifice, etc.) posent le même problème. Signalons que les revues militaires ne sont pas comptées comme « spectacles ouverts », alors qu?elles ont pu en être très proches lorsqu?elles étaient fortement spectacularisées, comme lors du « branle-bas de combat » organisé de nuit, avec force illuminations, tirs de canon, mouvements de navires, dans la rade de Cherbourg le 18 juillet 1900 pour la venue du président Loubet. Plusieurs milliers de spectateurs y assistent, le simulacre de combat était présenté dans la presse comme le clou du spectacle (AN 1AG3).

  • Pour l?ensemble de ces raisons, les comptabilisations proposées ne doivent pas être conçues comme des dénombrements parfaits, mais plutôt comme le moyen de dévoiler des ordres de grandeur permettant de comparer les activités de voyage des différents présidents et l?environnement dans lequel elles sont réalisées. Les tableaux proposés mélangent ainsi des activités à la fois officielles et officieuses, des catégories utilisées à l?époque par les acteurs officiels des déplacements, mais aussi des variables dont la construction et le codage reposent entièrement sur mes propres choix. Pour autant, j'espère ainsi proposer dans sa globalité un panorama comparé de ce que sont ces visites présidentielles et les évolutions qui les caractérisent. En ce sens, ils visent à construire des types-idéaux de visites bien plus qu?à assurer des comptages minutieux.


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